Réussir son premier roman – IX : Premier jet, deuxième jet…

SE LANCER DANS LE PREMIER JET !

Une fois votre plan terminé, c’est le jour J : lancez-vous ! Et ne vous retenez surtout pas ! Lors du premier jet, l’essentiel est d’avancer, quitte, parfois, à laisser un peu de côté certains passages sur lesquels vous reviendrez plus tard, afin de ne pas perdre votre souffle. À titre personnel, j’ai une façon un peu particulière d’écrire, mais je sais que plusieurs de mes confrères ont une technique assez similaire : l’après-midi, j’écris, vite, sans trop me relire, j’avance, je fonce. Le lendemain matin, je retravaille ce que j’ai écrit la veille, et j’obtiens donc déjà un premier « deuxième jet ». Cette technique a deux avantages : d’abord, vous avez le sentiment d’avancer, et vous ne vous freinez pas dans la phase d’écriture. Ensuite, le lendemain, vous revenez sur votre texte en ayant pris du recul. Ne dit-on pas que le nuit porte conseil ?
Si vraiment vous croyez à votre projet, alors je ne saurais trop vous conseiller, une fois que vous êtes lancé, d’écrire tous les jours. Absolument tous les jours ! Croyez-moi : on perd très rapidement le fil, quand on laisse passer trop de temps entre deux sessions d’écriture. Pour garder une vision cohérente, une vision d’ensemble de son projet, il faut vivre dedans au quotidien. Plus vous laisserez passer de temps entre vos séances de travail, plus vous aurez de peine à retrouver le fil de votre livre, le ton de votre écriture, même, et il est des milliers d’auteurs merveilleux dont nous n’avons malheureusement jamais entendu parler parce que leurs tiroirs sont emplis de romans inachevés !
Si vous avez besoin de vous motiver, obligez-vous à certaines règles. Un chapitre par jour, par exemple. Ou un certain nombre de mots. Et efforcez-vous de les respecter. Allez, je vous donne encore une petite astuce, un petit secret : le soir, quand je décide de m’arrêter d’écrire, j’aime bien commencer une phrase, et ne pas la finir. C’est un petit jeu idiot, mais efficace : le lendemain, je n’ai qu’une seule envie, courir sur mon ordinateur pour terminer cette fichue phrase !

LA FORME

L’écriture de votre roman, à présent, va nécessiter une chose dont vous pouviez vous passer dans les étapes précédentes : le style. Oui ! Le style, nous l’avons vu plus tôt, est au moins aussi important que l’histoire ! Un bon roman, c’est un roman où l’équilibre est réussi entre le fond et la forme. Les jeunes auteurs, il faut bien l’avouer, ont souvent tendance à négliger le style. Ayant été lecteur professionnel aux éditions J’ai Lu il y a une vingtaine d’années, j’ai vu arriver des manuscrits au style absolument épouvantable, et je ne vous cache pas que ces manuscrits… ne sont pas lus ! Quand, dès la première page, le texte est empli de fautes d’orthographe, de syntaxe, de grammaire, ou que le style est trop maladroit, il tombe vite des mains ! Je vais être un peu dur : si vous ne savez pas écrire, apprenez à le faire avant d’envoyer votre manuscrit !
Écrire, cela s’apprend. La meilleure école, bien sûr, c’est la lecture attentive. Analysez le style des livres que vous lisez, des livres que vous aimez. Etudiez la construction des phrases, la richesse du vocabulaire… Si vous sentez que le style est chez vous un point faible, alors n’hésitez pas, même, à vous lancer dans la lecture d’ouvrages sur la stylistique. Il en existe beaucoup ! Apprenez à chasser les répétitions, à enrichir votre champ lexical, à rythmer vos phrases (n’hésitez pas à vous lire à haute voix, par exemple, pour « sentir » votre phrase), à améliorer votre syntaxe. Apprenez à adapter votre style au sentiment que vous voulez transmettre…
Le principal défaut que l’on retrouve chez les « débutants » (j’ai horreur de ce mot…), c’est un manque de maîtrise du temps. Réfléchissez bien au temps que vous utilisez dans la narration. Pourquoi raconter au présent ? Pourquoi raconter au passé ? Quelle est la différence entre un imparfait et un passé composé ? Il vous faut une bonne raison, mais une fois que vous avez choisi le temps de votre narration, restez fidèle à votre choix ! Et surtout : attention à la concordance !
Un dernier mot, enfin, sur les descriptions. C’est souvent ce qu’il y a de plus ennuyeux à faire, les descriptions (enfin, pas pour moi… j’adore ça, mais je suis un peu pervers…). Et pourtant, décrire l’univers dans lequel évolue vos personnages est essentiel. Il ne faut pas hésiter à situer chaque scène dans l’espace. Donner des couleurs, des sons, des lumières, des odeurs, donner de la vie à votre scène ! De même, n’hésitez pas à couper vos dialogues de quelques petites descriptions (rien de pire que de longues pages de dialogues continus…), mettez vos personnages en mouvement, faites-leur faire quelque chose, même quand ils parlent. Allumer une cigarette, boire un verre… Bref, faites-en de véritables êtres humains, et permettez à vos lecteurs d’entrer dans votre roman en lui donnant de la consistance.

LE DEUXIÈME JET, ET LES SUIVANTS…

Une fois votre premier jet terminé, si vous pensez que le travail est fini, vous avez peu de chance de trouver un éditeur ! Rares sont les génies qui, dès leur premier jet, ont livré le meilleur roman qu’ils pouvaient écrire, et j’ai trop souvent vu de jeunes auteurs négliger le temps de la réécriture et se priver ainsi de la chance d’élever leur roman au niveau qui aurait pu leur permettre d’attirer l’attention d’un éditeur.
Le deuxième, et parfois le troisième, quatrième ou cinquième jet, c’est la couche de vernis nécessaire qui va terminer votre œuvre. Vous ne pouvez absolument pas vous en priver, et la satisfaction d’avoir « terminé » ne doit surtout pas vous faire baisser votre garde. Laissez passer quelques semaines, et remettez-vous au travail !
Retravailler un roman, cela ne se fait pas en quelques jours. C’est souvent un travail long, parfois aussi long, parfois même plus long que le premier jet ! Il est important, une fois le premier jet terminé, de prendre le temps de la réflexion, de chercher des avis extérieurs en faisant lire ce premier jet à des proches, puis de le relire vous-même avec le recul que vous aurez pris. S’il y a des passages que vous sautez vous-même en relisant votre livre, par exemple, c’est très mauvais signe : il y a de fortes chances que ces passages soient ennuyeux pour vos lecteurs ! Il faut alors vous y plonger de nouveau, chercher un moyen de rendre ces passages agréables à lire, en les coupant, en les réarrangeant, en changeant le style…
Sans vouloir paraître excessif, je pense que vous ne devriez pas estimer que votre livre est terminé tant que vous n’êtes pas fier de chaque phrase qui s’y trouve ! Posez-vous toujours la question : est-ce que je ne peux pas faire mieux ? Parfois, retravailler un roman peut prendre des mois ou des années, mais si ce travail vous permet de vous faire publier, il serait bien dommage de ne pas le faire, non ?